N°367/368 Sept/Oct 2007 - Laurent Lagartempe s´explique

Laurent Lagartempe s'explique
LECTURE et TRADITION : Laurent Lagartempe, vous vous êtes fait connaître par un essai paru en 2003, Le petit guide du coran, qui obtient un certain succès. Etait-ce votre première publication ?
Laurent LAGARTEMPE : En fait d'écrits antérieurs, je n'avais à mon actif que des articles techniques dans des revues de ma mouvance professionnelle d'agronome, ce qui normalement n'engage que modérément à de grands efforts en matière de qualité d'écriture. Or, avec un peu de recul et compte tenu de ce que me renvoient mes lecteurs, je constate que le livre doit une part de son succès, sinon à ses qualités de langue, du moins à une certaine forme d'expression qu'il m'importe de chercher à préciser. L'avis le plus courant est que ce qu'apporte le livre est clair et convaincant, autrement dit que sa fonctionnalité ne ressortit ni à l'autorité ni à la polémique mais à la démonstration. Cela me touche parce que justement je répugne à la polémique et que je n'ai nulle autorité universitaire ou autre à invoquer pour asseoir ma démarche. J'ai abordé le coran comme un objet nouveau pour moi et manifestement bizarre, puisqu'il est de notoriété publique qu'on semble pouvoir lui faire dire tout et son contraire. J'ai entrepris le travail avec la conviction que cet objet aussi bizarre soit-il, ne devait pas pouvoir résister plus longtemps à une démarche tant soit peu logique.
L . & T. : Ce qui veut dire que l'angle d'attaque de votre sujet est de type scientifique plutôt que théologique, philosophique ou littéraire, que c'est votre culture
d'ingénieur qui a prévalu dans l'esprit de votre démarche ?
L.L : C'est l'évidence même pour quiconque s'aperçoit que mon analyse de l'objet bizarre repose entièrement sur la confection d'un tableau à double entrée,
figurant à la fin du livre ; procédé qui correspond au b a ba de toute recherche d'ingénieur ou de scientifique abordant pour la première fois un objet inconnu.
Bien entendu on n'arrive à rien de bon en plaquant n'importe quel tableau à double entrée sur un objet à décrypter ; c'est l'approche informelle préalable qui
doit conduire intuitivement à la composition du tableau. Après avoir lu, beaucoup relu et pris des notes on s'aperçoit, dans le cas du coran, que la bizarrerie de l'ouvrage tient moins au sens qu'il véhicule qu'à sa composition extrêmement désordonnée et redondante. D'où l'idée de récapituler les parties fragmentaires semblables ou complémentaires par thèmes principaux assez facilement discemables. Je ne peux mentionner ici tout ce que cette simple remise en ordre peut avoir d'effets démonstratifs sur ce que dit ou ne dit pas le coran. (...)