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Louis-Maurice BOUTET DE MONVEL (1850-1913)

Louis-Maurice BOUTET DE MONVEL (1850-1913)
Louis-Maurice Boutet de Monvel est né à Orléans, le 18 octobre 1850. Il est décédé à Nemours, le 16 mai 1913. Artiste peintre et illustrateur.
Boutel de Monvel est né dans une famille de dix enfants. Son père, lui-même dernier né d'une famille de quatorze enfants, chimiste distingué, professeur de sciences au Lycée Charlemagne, et sa mère, directrice d'un cours de jeunes filles, avaient tous deux un goût très vif pour les Lettres et les Arts, qu'ils savaient faire partager à tous leurs enfants. Ce goût n'était pas nouveau dans la famille Monvel. L'arrière-grand-père de Louis-Maurice, l'acteur et auteur Jacques-Marie Monvel, de qui Chénier a pu dire "qu'il était le plus grand acteur tragique de l'Europe", avait joué devant la reine Marie-Antoinette à qui il dédia son "Amant bourru", avant de devenir lecteur de Gustave Ill de Suède et directeur du Théâtre royal de Stockholm. A son retour en France, il entrait à la Comédie-Française et, en 1795, il était nommé membre de la 4e classe de l'institut.
Une de ses filles née hors mariage, Melle Mars, se rendit célèbre à la Comédie-Française au temps de l'Empire. Son fils légitime, Noël-Barthélémy Monvel, auteur dramatique, secrétaire de Cambacérès était marié à une fille de Baptiste aîné, lui aussi, célèbre sociétaire de la Comédie-Française, issu d'une famille d'acteurs de la maison de Molière où l'on retrouve les Féreol et les Desmousseaux. Du côté de la mère de Louis-Maurice, les Nourrit étaient de brillants artistes lyriques, Louis Nourrit, chanteur dramatique, fit un grand nombre de créations, à l'Opéra, où son fils Adolphe devait l'éclipser dès l'âge de 19 ans. Ambroise Thomas disait de lui : "Celui qui a entendu Adolphe Nourrit ne l'a jamais oublié". Une vraie famille de "Pantins", comme l'écrivait l'acteur Féréol dans une note auto biographique conservée à la Bibliothèque de l'Opéra. Une nouvelle vocation artistique dans la famille Monvel n'avait donc rien de surprenant. Celle de Louis-Maurice s'est affirmée dans sa peinture, par son goût pour le décor et les attitudes théâtrales dans ses dessins, par le rendu des expressions secrètes ou familières de ses personnages, avec un minimum de moyens. Au sortir du lycée Charlemagne où il fit de bonnes et sérieuses études, le jeune Maurice attiré par la peinture, s'y consacre entièrement. Encouragé par quelques parents et amis familiers des Monvel, il se met à fréquenter les milieux artistiques où il reçoit tout de suite bon accueil. A vingt ans, très fortement marqué par la défaite de 1870, il se fit un devoir de s'enrôler dans l'Armée de la Loire et ce n'est qu'après cette dramatique interruption qu'il se fit admettre dans l'atelier du peintre Cabanel. Il y côtoie de nombreux élèves qui devaient plus tard acquérir la célébrité : Henri Regnault et Bastien Lepage... Successivement il va travailler dans les ateliers de Rudder, de J. Lefebvre et de Gustave Boulanger, enfin dans celui de Carolus Duran, éminent portraitiste, spécialité où précisément le dessin joue un rôle essentiel. De son passage dans ces ateliers, il laisse le souvenir d'un garçon affable, loyal et bon, brillant causeur, d'un esprit fin et subtil, et les amitiés qu'il aura nouées dureront toute sa vie. Dès 1874, il expose une Tentation de saint Antoine à la Société des Artistes français qu'il quitte peu après pour entrer à la Société nationale des Beaux-Arts où il ne cesse d'exposer des portraits ou tableaux de genre. Aux divers salons, il obtient la 3e médaille en 1878, se classant hors concours avec Le Bon Samaritain, une médaille de seconde classe au Salon de 1880 avec Toilette avant le Sabba1, la 2e médaille de bronze en 1889 et enfin la médaille d'or à l'Exposition de 1900 avec le grand panneau décoratif Jeanne d'Arc à Chinon, actuellement au Musée de Chicago.
Pendant cette période, il exécute de nombreux portraits d'acteurs comme Mounet Sully, Paul Mounet, Melle Dudlay, Melle Rachel Boyer, de Paul Lebaudy, industriel et homme politique français, de plusieurs membres de sa famille ou amis, se faisant aussi une renommée de portraitiste d'enfants. Peu après ces débuts, il était allé visiter l'Algérie d'où il avait rapporté de nombreux tableaux, qui, selon un critique de l'époque, comptent parmi ses meilleurs.
Les toiles les plus remarquées furent un Retour de Marché aujourd'hui au musée d'Amiens, La maison abandonnée qui avait trouvé place parmi les chefs-d'oeuvre du Luxembourg. Citons également : Sur les hauts plateaux (1878) et une Mosquée kabyle (1880), Les Vieux (1887). En 1885, il avait provoqué un scandale avec un tableau intitulé L'Apothéose qu'il dut retirer du Salon sur l'injonction du Ministère des Beaux-Arts, mais qui n'en fit pas moins les délices du public parisien, car il fut exposé dans le hall principal du Figaro où l'accueil des curieux et des amateurs le consola de la rebuffade officielle. Le sujet représentait un ivrogne couronné par Robert Macaire et acclamé par la foule. L'allusion politique - certains y virent une satire de la démocratie - provoqua l'incident.
L'originalité de cette composition tenait surtout à la vigueur des coloris et à une puissance d'exécution peu communes. En 1876, Maurice de Monvel s'était marié avec une amie d'enfance, Jeanne Lebaigue, la fille du latiniste Charles Lebaigue, auteur du fameux dictionnaire latin-français, qui passa entre les mains de plusieurs générations d'étudiants. A la joie d'un bonheur partagé, sont venues, sinon les difficultés financières, du moins la nécessité d'apporter des ressources substantielles au ménage qui ne tarda pas à s'agrandir. Trois fils naissent de cet heureux mariage. Le second, Bernard, né en 1881, fera lui aussi une très brillante carrière de peintre notamment aux Etats-Unis. A partir de cette époque, il entame une collaboration régulière avec .un journal pour enfants le "Saint Nicolas" où il apporte une suite de charmantes illustrations, pleines de verve et d'esprit.
Grand dessinateur, Maurice de Monve1 obtenait un rendu de toutes les expressions des visages, uniquement avec des traits d'une grande finesse et sans ombres.
Les attitudes comme les expressions de ses petits personnages sont des plus variées et appropriées aux textes. La fantaisie, la verve qui agrémentent ces illustrations lui valent un surcroît de renommée. L'éditeur Eugène Pion, ami et admirateur du peintre, lui demande d'illustrer des ouvrages pour enfants et, en 1883, Maurice de Monvel lui apporte Vieilles Chansons et Rondes aussitôt éditées. Cette première série qui fut un succès (pour les enfants, comme pour les parents amusés) est suivie d'une seconde Les Chansons de France pour les tout-petits Français, puis de Nos Enfants d'Anatole France, de Filles et garçons avec comme sous-titre "Scènes de la ville et des champs" également d'Anatole France, des Fables de La Fontaine, de La civilité puérile et honnête. Vinrent ensuite La farce de maître Pathelin, en peinture monochrome, cette "joyeuse comédie de notre vieux théâtre national" à laquelle "le charmant crayon de M. Boutet de Monvel (a donné) un surcroît d'esprit et de caractère pittoresque" (comme l'écrivait un critique de l'époque), et Xavière de Ferdinand Favre. Enfin, un ouvrage sur la vie de saint François d'Assise pour un éditeur américain.
Toutes les esquisses qu'il avait faites de ses propres fils, de ses nombreux neveux et nièces lui servirent pour l'illustration de tous ses livres. Il avait appris à aimer ces enfants dont il faisait le portrait, à les connaître, à deviner leurs sentiments naissants, sachant saisir avec un rare bonheur toutes les physionomies étonnées ou naïves de ses petits modèles. On ne saurait en outre oublier le rôle pédagogique de cette oeuvre considérable d'illustrateur, mettant la précision du dessin au service de l'éducation des enfants. La société peinte par Maurice de Monvel, empreinte des exigences du bon goût et du savoir-vivre, reste celle d'une bourgeoisie attachée aux valeurs morales traditionnelles, le patriotisme et les traditions spi rituelles, si heureusement associés dans sa Jeanne d'Arc ou dans Xavière.
Sa renommée s'était portée jusqu'en Amérique où on le pressa de se rendre. Il s'y décida avec entrain. Mais s'il reçut le meilleur accueil comme homme et comme peintre, accueil aux effets les plus prometteurs, il ne put prolonger son séjour : le climat ne convenait pas à sa santé. Quand, en 1901, il revint en France, il était atteint de tuberculose. Il fallait, sinon arrêter tout travail, du moins se ménager. Il se rendit à Nemours, en Seine-et-Marne, où il comptait de fidèles amitiés et où plusieurs membres de sa famille venaient passer leurs vacances. Il fit construire un atelier sur une partie du jardin de la vieille maison où il avait élu domicile, cours Balzac, et il se remit au travail. Sa manière de traiter les portraits ou les personnages avait changé. Comme pour ses illustrations en aquarelle des livres pour enfants, il avait adopté, pour les portraits à l'huile qui lui étaient commandés, des tonalités claires, de douces transparences : une peinture délicate, à l'exemple des enluminures ou des miniatures. S'il put achever, à Nemours, le deuxième des trois panneaux prévus pour la Basilique de Domrémy, sans espoir de mener à bien le troisième qu'il avait esquissé, il eut la consolation de recevoir la commande d'un riche acheteur étranger, des mêmes panneaux, en format réduit et présentés découpés en huit petits tableaux ; il ne put exécuter que les six premiers. Il meurt à Nemours, à 63 ans, le 16 mai 1913, après avoir eu la douleur de perdre son troisième fils, encore tout enfant. En 1897, il avait reçu la croix de la Légion d'Honneur. J.G.