"L'essai est la seule forme littéraire qui avoue, dans son nom même, que l'acte irréfléchi connu comme étant l'écriture est véritablement un saut dans l'inconnu. Quand des hommes essaient d'écrire une tragédie, ils n'appellent pas la tragédie un essai. Ceux qui ont peiné tout au long des douze livres d'une épopée, à l'écrire de leur propre main, ont rarement prétendu qu'ils avaient composé une épopée à titre d'expérience. Mais un essai, tant par son nom même que par sa véritable nature, est vraiment une tentative et vraiment une expérience. Un homme n'écrit pas vraiment un essai. Il essaie véritablement d'écrire un essai. Il en résulte que, bien qu 'il existe maints essais fameux, il n'y a fort heureusement aucun essai modèle. L'essai parfait n'a jamais été écrit, pour la simple raison que l'essai n'a jamais été vraiment écrit. Les hommes ont tenté d'écrire quelque chose pour découvrir ce que c'était censé être. À cet égard l'essai est un produit typiquement moderne, plein d'avenir et à la louange de l'expérience et de l'aventure. Il reste en soi quelque peu évasif et je dois reconnaître que je suis poursuivi par le vague soupçon que l'essai va probablement devenir plus péremptoire et plus dogmatique, tout simplement à cause des divisions profondes et implacables que peuvent nous imposer les problèmes éthiques et économiques. Mais espérons qu'il y aura toujours place pour l'essai qui en soit vraiment un. Saint Thomas d'Aquin, avec son bon sens habituel, disait que ni la vie active ni la vie contemplative ne sauraient être vécues sans distraction, sous forme de plaisanteries et de jeux. Le drame ou l'épopée pourraient bien être appelés : vie active de la littérature ; le sonnet ou l'ode : vie contemplative. Quant à l'essai, c'en est la plaisanterie."
Collection "Revizor". Recueil d'écrits consacrés à la littérature présenté en 5 parties : La littérature en général - Livres remarquables d'écrivains - Pensée et croyance - Chez nous à l'étranger - Le sel de la vie. Chesterton y exprime son grand talent de critique littéraire (au moins égal à celui d'apologiste du christianisme).
Une clé d'or . .----. Malgré leur ancienneté ( 1905-1950 ), ces textes n'ont pas perdu d'intérêt. Dans son œuvre Chesterton traque " l'homme éternel ". Il avait, semble-t-il, " une clé d'or " qui résiste à l'érosion du temps. Ici, ni péremptoire, ni dogmatique, il nous conduit à réfléchir avec sympathie et même modestie puisqu'il dit réduire le rôle de l'Essai en littérature à celui de la plaisanterie. ..... ******** ..... POUR QUI CE LIVRE ? Pour tout lecteur cultivé. [ numéro 155 - avril 2011 de " Plaisir de Lire " ( 31 rue Godot de Mauroy - 75009 - Paris ) le numéro : 7,10 euros - l'abonnement 28 euros ]
Plaisir de Lire . - 29/01/2015
- ISBN : 9782825140734
- Titre : Le sel de la vie et autres essais
- Auteur : CHESTERTON (Gilbert Keith)
- Editeur : L'AGE D'HOMME (EDITIONS)
- Collection : REVIZOR
- Nb Pages : 232
- Présentation : Broché
- Epaisseur : 20
- Largeur : 125
- Hauteur : 190
- Poids : 0.24Kg
Gilbert-Keith CHESTERTON (1874-1936)
Gilbert-Keith Chesterton, né à Londres le 29 mai 1874, est un écrivain catholique, brillant journaliste, qui a publié des études littéraires et philosophiques, des nouvelles et des romans.
"Optimiste, ami de la vie, écrivent MM. Legouis et Cazamian, il raille fougueusement les erreurs modernes dont la santé franche et joyeuse est victime : les aigreurs puritaines, la morbidité pessimiste, l'inquiétude d'esprits qui ont perdu, avec la foi, l'équilibre de leur être, et surtout la maladie la plus grave de notre siècle, la manie raisonnante des intelligences déréglées." Ses ouvrages tirent de là leur signification : La Sphère et la croix ; Orthodoxie ; Les Crimes de l'Angleterre.
ll est décédé le 14 juin 1936 à Beaconsfield.
(Extrait du livre de l'abbé Louis Bethléem : "Romans à lire et romans à proscrire", édition de 1925. Nous y avons ajouté la date de son décès).
"Apologiste à coup sûr, mais d'une espèce à part : jamais abstrait, ni grave, ni docte, jamais superficiel non plus, cet esprit pénétrant et singulier a réalisé ce paradoxe de mettre l'humour au service de la foi". Joseph de Tonquédec
"Parler de lui, c'est évoquer l'image d'un polygraphe assailli par une demi-douzaine de muses ; d'un jongleur de Notre-Dame, dont les cabrioles étaient devenues un peu automatiques, dont l'humour s'était fait laborieux, mais aussi d'un univers dominé par la Croix.. Ce Jupiter tonnant, cet Anglais typique, malgré le sang français aimait la bière, la bonne chère, les cigares, haïssait l'hypocrisie, la tyrannie, la ploutocratie, et se regardait lui-même avec une humilité de saint, avec un houssement d'épaules. Il avait trop crevé de baudruches, brisé trop d'idoles, fracassé trop de dessus de pendules pour se dresser lui-même sur un piédestal." G. M. Tracy
Ces deux citations sont extraites du Dictionnaire des Auteurs de Laffont-Bompiani (Bouquins).
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